L'essor du télétravail : évolution ou régression ?

Publié le 20 décembre 2024 à 09:00

Brève historique de l’apparition du télétravail : 

Les premières traces du télétravail remontent à 1950, lorsqu’un mathématicien américain, Norbert Wiener, supervise à distance depuis l’Europe la construction d’un bâtiment aux États-Unis. En France, dans les années 1970, les pouvoirs publics commencent à promouvoir le télétravail comme un levier d’aménagement du territoire. Avec l’essor de la mondialisation et des ordinateurs personnels, il devient progressivement un outil de délocalisation pour les entreprises, permettant de réduire les coûts tout en favorisant la mobilité. L’intégration définitive du télétravail en tant que méthode de travail s’est opérée dans les années 1990 grâce au développement des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication). Enfin, dans les années 2000, le télétravail s’inscrit comme un véritable projet organisationnel, bien que sa pratique reste souvent insuffisamment régulée.

 

Le télétravail et la crise sanitaire : 

Le télétravail a connu une expansion considérable en raison de la pandémie du COVID-19. Il avait un double objectif : freiner la diffusion de l’épidémie en réduisant la mobilité et les contacts physiques, tout en préservant l’activité des entreprises. La pandémie a obligé certaines entreprises à adopter ce mode de travail comme solution pour respecter les mesures sanitaires de distanciation sociale et assurer la continuité et la pérennité de celles-ci. 

Avant la pandémie, le télétravail était souvent perçu comme un privilège ou une option limitée à certains secteurs. La crise sanitaire l’a démocratisé. Il s’est alors imposé dans les entreprises dont les secteurs utilisent des outils informatiques. 

En janvier 2021, 27% des salariés le pratiquent, contre 4% en 2019, ainsi 8 travailleurs sur 10 souhaitent le poursuivre tout en réduisant son intensité. Cette crise a conduit de nombreuses entreprises à accélérer considérablement la transition d’un télétravail occasionnel à un télétravail régulier, avec 2 à 3 jours par semaine, voire à un télétravail obligatoire à temps plein sur 5 jours. Ainsi, de nombreux travailleurs sont passés d’une organisation volontaire du télétravail à une pratique rendue obligatoire. Par ailleurs, cette crise a amplifié les effets du télétravail sur les troubles physiques et mentaux, ainsi que sur l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Les causes sont nombreuses : certaines entreprises, non préparées au télétravail, ont dû tout mettre en place dans l’urgence ; certains employés, n’ayant jamais pratiqué le télétravail, n’étaient pas prêts non plus. De plus, dans de nombreux foyers, plusieurs membres ont dû s’adapter simultanément au télétravail, rendant nécessaire une organisation pour concilier les activités professionnelles de chacun. Enfin, l’isolement social engendré par la crise a également joué un rôle important. 

 

En matière de télétravail, il y aura donc un avant et un après-crise. Ce passage forcé vers le télétravail a convaincu les plus réticents sur les avantages du télétravail, autant les entreprises que les travailleurs. Les entreprises ont pu réaliser qu’elles pouvaient avoir confiance en leur travailleurs pour réaliser un travail de qualité et efficace même à distance. 

Les premières recherches post-covid montrent un pourcentage assez élevé de travailleurs souhaitant télétravailler plus fréquemment, même après la levée des mesures de distanciation physique. Les travailleurs n’ayant jamais télétravailler ont alors pu découvrir et s’initier à cette nouvelle méthode de travail pendant la crise et ont alors pu se familiariser avec les différents outils de télétravail. De plus, de nombreux cadres auparavant réticents à l’idée que leurs équipes travaillent à domicile, ont constaté que c’était possible et y sont désormais favorables. Ceux qui ont goûté au télétravail voudront continuer à profiter de cette flexibilité temporelle et géographique tout en limitant le nombre de jours de télétravail par semaine. Néanmoins, l’expérience a aussi montré que “trop de télétravail” entraîne des problèmes de plus en plus importants tant pour la santé physique que mentale du télétravailleur.  

 

Nouvelles tendances du télétravail 

Le télétravail est donc un phénomène de société majeur, il subit des hauts et des bas. Une bonne part des employés y voit l’avantage d’être comme un travailleur indépendant et de pouvoir trouver un nouvel équilibre entre temps passé pour les obligations personnelles et pour la vie professionnelle. Cependant, certaines entreprises françaises (82%) demandent à leurs employés de revenir travailler en présentiel, au bureau invoquant la productivité. Notons tout de même, que les multinationales comme Apple ou Google ont contribué à l’essor du télétravail pendant la pandémie et ont ainsi adopté un modèle d’organisation hybride incitant les salariés qui habitent loin de venir seulement quelques jours au bureau dans la semaine. 

Plus généralement, alors que 62% des travailleurs intellectuels aspirent à télétravailler 2 à 3 jours par semaine, 68% travaillent principalement au bureau. Seulement 13% travaillent effectivement à distance 3 jours ou plus par semaine ce qui met en avant une grande différence entre les souhaits des employés et les directives des employeurs. D’après une étude européenne de SAP Congru, 70% des salariés accepteraient de revoir à la baisse leur salaire en échange d’un maintien du télétravail. Ainsi la principale motivation des employés à revenir au bureau, travailler en présentiel, serait avant tout financière avec 70% citant des avantages tels que le remboursement des frais de transport et la prise en charge des repas. 

Pour les entreprises le télétravail serait aussi bénéfique car elles auraient la possibilité de réduire leurs coûts fixes notamment immobiliers en investissant des locaux plus petits. C’est aussi un bon moyen de réduire le taux d’absentéisme en permettant aux salariés de s’adapter aux aléas du quotidien lorsque cela est nécessaire. Cependant, il existe des professions ne permettant pas de télétravailler comme les métiers de l’industrie, de la santé ou du BTP ou encore de l’agriculture. 

 

Le télétravail, étant perçu initialement comme un privilège ou une exception, a réussi à s’imposer comme une nouvelle norme notamment grâce à la crise sanitaire. Faisant ainsi apparaitre ses avantages, comme la flexibilité, et mettant en lumière ses défis en matière de santé. Aujourd’hui, le télétravail pose question en matière d’équilibre entre les aspirations des employeurs et celles de leurs employés. Ce mode de travail, désormais incontournable pousse à repenser la manière de travailler et repenser les pratiques managériales, tout en permettant de s’adapter aux enjeux de demain en matière de collaboration hybride. 

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